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Les choqués et l’obsédée du papier bleu
02/06/2010 12:35
La bande de l’UMP d’un côté, Royal de l’autre : la politique d’aujourd’hui ne fait pas envie.
par David Desgouilles
Les professionnels du choquage sont à l’œuvre. Après les affaires Zemmour, Frèche et bien d’autres, voici que, depuis samedi, c’est Martine Aubry qui est dans l’oeil du cyclone après avoir osé une analogie avec Bernard Madoff, escroc le plus célèbre de ces dernières années.
Ainsi, Xavier Bertrand, le cœur gros, a déploré l’injure publique, l’insulte publique. Frédéric Lefebvre, lui aussi, y est allé de sa petite larme. Comparer le Président à un homme condamné pour cent cinquante ans de prison, c’est grave, qu’on se le dise. Et c’est quelqu’un de très sérieux, Lefebvre. Quelqu’un qui, le plus naturellement du monde, nous faisait part de sa peur pour la santé du président quand des poupées vaudou à l’effigie présidentielle étaient en vente libre. Pour finir ce tiercé ridiculo-pittbullesque de la galaxie Sarko, il ne manquait que Nadine Morano qui a laissé le choix à Aubry entre les excuses publiques et la démission.
Franchement, qualifier Nicolas Sarkozy d’escroc, ce n’est pas une insulte. C’est juste un constat. L’escroquerie politique est sa marque de fabrique depuis 1974, date à laquelle il a pris sa première carte de l’UDR. On pourrait juste reprocher à Martine Aubry d’avoir attendu, pour lui lancer cette invective méritée, qu’elle le fasse pour voler au secours d’un autre escroc politique patenté, François Mitterrand, qui avait été la victime quelques jours plus tôt de son lointain successeur -et utilisateur de la même cartomancienne à Rolex.
Certes, cette bagarre a quelque chose de factice. Comme Zemmour ce matin, on imagine très bien que cette polémique arrange les deux protagonistes, UMP et PS, alors qu’ils tentent tout deux de sauver leur conception commune de l’Europe et de la mondialisation, en réel danger. Le journaliste, comme d’habitude, a flairé le jeu de rôle. Son confrère de RTL Duhamel a, quant à lui, fait sa leçon de morale à Martine Aubry, alors qu’il avait usé, vendredi dernier, d’une analogie qui n’a guère soulevé l’indignation sauf sur ce modeste blog.
Alors que les porte-flingues de l’UMP n’avaient pas encore déposé les armes, voilà que l’un d’entre eux, Dominique Paillé, faisait lui aussi l’objet d’une plainte, judiciaire cette fois-ci, de la part de Ségolène Royal. Celle-ci n’aurait pas apprécié de se faire traiter d’illuminée dans un journal féminin. Royal va encore plus loin puisqu’elle convoque la Justice. On monte encore d’un étage dans la bêtise crasse. La Présidente du conseil régional de Poitou-Charente plonge dans l’envie de pénal, dans la judiciarisation à l’anglo-saxonne. Comme si les juges n’avaient pas d’autre chose à faire, elle leur demande d’arbitrer entre des personnalités politiques alors qu’il nous semblait qu’en démocratie, c’était plutôt le rôle du Peuple.
Il y avait pourtant tant de choses à répondre à Monsieur Paillé, si Ségolène Royal avait fait preuve d’imagination au lieu de se ridiculiser avec cette plainte judiciaire. Lui répondre que se faire traiter d’illuminée par un apparatchik, doté du charisme d’un bulot, valait compliment, d’autant qu’elle n’était pas persuadée que de lumière il n’avait, lui, à tous les étages, voilà qui aurait pu constituer une réponse adaptée. Au lieu de cela, elle se vautre dans le papier bleu.
Il y a en revanche des personnalités politiques qui ne se laissent pas marcher sur les pieds et qui n’ont pas besoin de juges pour rendre coup sur coup. En l’occurrence, je suis certain que Jean-Luc Mélenchon fera passer un sale quart d’heure à Alain Duhamel lors de leur prochaine confrontation et lui fera payer la fameuse divine surprise dont il était question ici samedi dernier.
Faire de la politique à l’ancienne, finalement, cela va devenir furieusement moderne.
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